La théorie de l’effondrement est portée par les « collapsologues » qui prédisent que sous la pression conjuguée du réchauffement climatique, de la croissance démographique, de la spéculation financière, qui détruit l’économie réelle, de l’épuisement des ressources, de la perte de biodiversité, le monde va finir par s’écrouler sur lui-même. Cette science-fiction peut-elle devenir réalité à la suite de la crise mondiale générée par le coronavirus ? Il est de toute façon une certitude, sans sombrer dans des délires inutilement anxiogènes : l’Humanité est arrivée à un tournant avec cette crise sanitaire et le monde d’après devra être en rupture nette avec le monde d’avant.
L’épidémie de coronavirus qui s’est répandue en trois mois sur toute la planète est en train de laisser le monde dans un état de sidération inimaginable. Champs Elysées à Paris, Time Square à New York, devant le Kremlin à Moscou, Place Saint Pierre à Rome, etc, etc… : les images de ces hauts lieux désertés de toute fréquentation humaine alors qu’ils grouillent traditionnellement de foules innombrables sont les images les plus parlantes de l’ampleur de la crise qui frappe le monde.
Le monde s’est soudainement mis à l’arrêt, et les inquiétudes sur la capacité de l’économie mondiale à se redresser après un tel choc sont nombreuses et fondées.
On imagine mal que l’arrêt brutal des économies du monde entier n’entraîne pas une nouvelle crise financière encore plus grave que celle de 2008. Car le système financier, avec ses banques d’affaires toujours aussi surendettées dix ans après, présente un risque majeur pour l’économie mondiale, notamment en Europe.
Le confinement, qui est la seule réponse raisonnable pour éviter un désastre sanitaire, suppose qu’il puisse être levé avant qu’il ne devienne intolérable pour les sociétés. Car les entreprises privées de toute activité ne peuvent que faire faillite une fois leurs réserves de trésorerie épuisées, plus ou moins vite selon leur type d’activité. Les activités de transport, ou liées aux transports comme le tourisme, sont les premières impactées. Mais toute la chaîne économique sera à son tour impactée, les chantiers navals n’auront plus de commandes des croisiéristes, les compagnies aériennes stopperont leurs commandes à l’industrie aéronautique, etc, etc… Tout cela laissera sur le carreau des cohortes de salariés qui auront vite épuisé leur capacité d’épargne, surtout les plus modestes. Socialement la situation deviendra intenable et la fin du confinement sera obligatoire tant les gens auront besoin de pouvoir à nouveau aller travailler.
Le « déconfinement » devra donc intervenir dans un délai raisonnable. Pour autant il faudra éviter à tout prix de relancer la propagation du virus que le confinement a réussi à bloquer dans son expansion, mais qui ne le fait pas disparaître comme le ferait un remède ou un vaccin. Un jour, remèdes et vaccins seront fabriqués. Mais dans combien de temps ? Et la crise économique, elle, n’attendra pas.
D’où la tension sur les masques qui pourraient permettre de limiter les risques d’une relance de l’épidémie s’ils sont portés avec rigueur par ceux qui reprendront une « vie normale ». Le spectacle de l’imprévoyance des pouvoirs publics allant « chiper » les masques des autres sur les tarmacs des aéroports en Chine et d’ailleurs ne manque pas d’inquiéter. Les autorités ne pourront prendre la décision du déconfinement qu’une fois les stocks de masques et de tests de dépistage reconstitués. C’est un préalable. Et manifestement il n’est pas rempli à ce jour.
Nous sommes au cœur d’une crise qui est lourde de menaces pour l’avenir. La Corse, de par sa démographie et de par la structure de son économie, est parmi les territoires les plus fragilisés. Même si le déconfinement est décidé, il s’accompagnera de mesures de précaution imposées à ceux qui se déplaceront, comme porter des masques et se dépister à intervalles réguliers. Aussi on imagine facilement que les déplacements liés au tourisme ne seront pas prioritaires, et que fréquenter les restaurants avec un masque que l’on devra garder de façon obligatoire ne sera guère enthousiasmant.
La Corse est menacée d’une récession sans précédent. L’espoir de sauver les meubles avec une saison qui aurait quand même lieu à minima est de plus en plus hypothétique.
Quoiqu’il en soit, il faut se mettre en position de limiter la casse et faire pression pour que le risque économique que nous courons soit pris en compte suffisamment dans les mesures de sauvegarde qui seront prises par l’Etat.
François ALFONSI, député européen Femu a Corsica / Régions et Peuples Solidaires membre du groupe Verts / ALE