François Alfonsi, député européen. Envers et contre tout

Élu au parlement européen en 2009, le maire d’Osani avait perdu son siège lors des élections de 2014. En renouant avec EELV, et malgré l’absence de soutien d’une grande partie des nationalistes, François Alfonsi fait son retour dans l’hémicycle strasbourgeois.

 

Sur la liste menée par Yannick Jadot, qui a réalisé plus de 23% hier soir, François Alfonsi pointait en neuvième position. Une position plus qu'honorable, qui lui a permis d'être élu. Une position qui était due à son statut de chef de file de la fédération Régions & Peuples Solidaires.

 

Le R&PS, c'est une fédération qui réunit des partis politiques régionalistes ou autonomistes de France. 

 

Entre les écologistes et R&PS, l’alliance remonte à loin.

 

Officialisée en 1989, ce partenariat avait permis à Max Simeoni d’être élu député européen. Et vingt ans plus tard, en 2009, c’est François Alfonsi qui, pour la première fois, avait fait le voyage jusqu’à Strasbourg. En 2014, pour le scrutin suivant, R&PS et François Alfonsi avaient été contraints de faire cavaliers seuls. Après des tractations sans fin au moment de la constitution de la liste commune, et une brouille, l’alliance avec les Verts avait tourné court. Et sans la force de frappe d’EELV, la liste n’avait obtenu que 0,75% des voix. François Alfonsi quittait donc le parlement européen.

 

Une majorité nationaliste en ordre dispersé

 

Hier, François Alfonsi, dans le sillage de Yannick Jadot et des Verts retrouvés, a triomphé.  Et il s'apprête à faire son retour à Strasbourg. Pour représenter les autonomistes insulaires. Mais aussi les autres. Lors de la campagne, le maire d’Osani l’avait déclaré : "Au –delà des nationalistes, je peux être le candidat de la Corse." Et c’était plutôt prudent, de ratisser large, à l'heure de convaincre les électeurs potentiels. Parce qu'il était difficile, alors que la campagne battait son plein, de compter sur les voix de la majorité nationaliste.

 

Le soutien était plutôt timide. Voire inexistant. Hormis chez Gilles Simeoni. Le président de l'Exécutif a soutenu le candidat, rappelant que la Corse avait besoin d’un député européen. Jusqu'à prendre la parole, le 21 mai dernier, au meeting parisien de Yannick Jadot. Mais chez Corsica Libera, en revanche, c'était un autre son de cloche.  François Alfonsi est un élu autonomiste, nationaliste, depuis plus de trente ans. Mais ce n'est pas suffisant pour obtenir le soutien de Corsica Libera. En 2019 comme en 2014. Plus surprenant, l'absence de consigne de vote du PNC, dont François Alfonsi a longtemps été un militant, et dont il fut élu porte-parole en 2002. 

 

La décision semble moins suprenante quand on sait que François Alfonsi et Jean-Christophe Angelini sont à couteaux tirés. 

Alors même si le PNC est proche, traditionnellement, de R&PS, pas question de soutenir le seul candidat corse en position éligible...

On s'en doute, Jean-Christophe Angelini balaie ces considérations personnelles d'un revers de main.

Porté par la vague verte qui s'est abattue sur l'Europe, mais également, et c'est plus rare, sur la France, François Alfonsi fera donc son retour au parlement européen, malgré le peu d'enthousiasme d'une partie des élus corses.  Reste maintenant à réussir à faire entendre sa voix dans la cacophonie de l'hémicycle strasbourgeois. L'expérience est là. Reste à savoir si cela suffira. 

 

 

Le parcours de François Alfonsi

 

Après des études en école d'ingénieur à Grenoble, François Alfonsi rentre en Corse, à 23 ans, pour enseigner les mathématiques à Vico. Nous sommes en 1976. L'affaire des boues rouges est encore dans toutes les têtes.

C'est à cette époque, que François Alfonsi développe une sensibilité environnementale. 

Très vite, il se détourne de l'enseignement pour devenir agent de développement au Parc Régional. En 1983, il prend part à la création de l'agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie. C'est au sein de l'ADEME qu'il poursuivra sa carrière. 

La même année, il entre en politique, en rejoignant les rangs de l'UPC (Unione di u Populu Corsu). Le mouvement nationaliste, fondé en 1977 par Max Simeoni, affiche de claires tendances autonomistes, teintées d'écologie.

En 1987, François Alfonsi est élu, avec Max Simeoni et Jacques Fieschi, à l'Assemblée de Corse. Il sera le président du groupe UPC. Il restera conseiller territorial jusqu'en 1998. 

En 2002 il est élu maire d'Osani, en Balagne. Il occupe toujours cette fonction. 

toujours en 2002, le PNC (Partitu di a Nazione Corsa) né de la fusion de l'UPC, dont Alfonsi est le secrétaire national, et des mouvements A Scleta Nova et A Mossa Naziunale. Il en devient le porte-parole. Avec max Simeoni et Fabienne Giovannini, il prendre également la tête du journal Arritti. 

Le 2 décembre dernier, le parti d'union Femu a Corsica voyait le jour. Il devait réunir les trois partis autonomistes Inseme, A Chjama Naziunale, et le PNC.

Et puis, deux jours avant l'officialisation de ce que l'on nous présentait comme le "grand parti de gouvernement", le PNC fait sécession. 

Jean-Christophe Angelini, membre de l'exécutif, mais également leader du PNC, avait, de toute évidence, d'autres projets. 

Une décision qui n'a pas convenu à François Alfonsi. 

Il adhère quand même à Femu a Corsica, et tourne le dos au parti qu'il a cofondé. Et peut-être, plus encore à Jean-Christophe Angelini. 

Des lignes de force mouvantes, qui expliquent peut-être, en grande partie, le concert discordant de la majorité nationaliste lors de la campagne des européennes.