Après la mort tragique du jeune marchand de poissons Mohsen Fikri le 31 octobre dernier à Taghzut (Elhocima), dans la région du Rif, écrasé dans une benne à ordures après un ordre lancé semble t-il par un policier : « th’en mmu ! » (broie sa mère), les manifestations populaires de grande ampleur n’ont jamais cessé.
Les citoyens et citoyennes de cette région entendaient protester contre les crimes, les détentions arbitraires, le racisme et les violences exercés par les autorités marocaines à l’encontre du peuple rifain. La condamnation à seulement 5 à 8 mois de prison et 500 Dirhams (50 €) d’amende des responsables de l’homicide de Mohsen illustre tout le mépris que cultive le Makhzen marocain à l’égard des rifains. En même temps, des manifestants pacifiques qui n’ont fait qu’exercer leur droit fondamental à la liberté d’expression, ont été sanctionnés par plusieurs années de prison et de lourdes peines d’amende. C’est une injustice intolérable et une provocation qui a pour effet de favoriser la rancœur et le rejet du citoyen envers l’Etat marocain. Et lorsque le citoyen ose élever la voix pour protester contre tant d’injustices, on lui oppose des forces anti-émeutes par milliers, avec la consigne de frapper fort sans distinction hommes, femmes, enfants et les personnes âgées, comme c’est le cas depuis des mois à Taghzut (Elhocima). Les contestataires sont raflés pour être jetés en prison (plus de 100 prisonniers actuellement) et les brutalités policières ont fini par provoquer l’irréparable : deux citoyens tués au cours de cet été.
Régions et Peuples Solidaires (R&PS) condamne fermement cette politique répressive aveugle que rien ne peut justifier et exprime sa totale solidarité avec le peuple rifain..
Le Rif, pays montagneux, a toujours été négligé, marginalisé sur le plan socioéconomique et a de fait vécu en marge du Maroc, se débrouillant seul pour survivre. La principale source de revenus des rifains, c’est l’émigration vers l’Europe. Cette ségrégation anti-rifaine doit cesser. Il nous parait indispensable et urgent de mettre un terme à la répression et d’entreprendre une vaste politique de réparation des fautes historiques et des blessures profondes infligées par l’Etat marocain au Rif. Plus précisément, RPS demande au gouvernement marocain :
- La libération immédiate des détenus du mouvement populaire du Rif, leur réhabilitation et la réparation des dédommages matériels et moraux qu’ils ont subis,
- La levée immédiate du blocus policier qui existe actuellement dans la ville de Taghzut (Elhocima) et sa région,
- La réhabilitation des détenus du mouvement dit du « 20 février » et la réparation des dommages matériels et moraux qu’ils ont subis,
- La présentation des excuses du gouvernement aux victimes de la répression,
- La fin des harcèlements policiers à l’encontre des citoyennes et citoyens du Rif et le rétablissement des libertés publiques, notamment celle de s’exprimer et de manifester librement,
- La mise en œuvre d’un grand programme de rattrapage économique et social pour toute la région du Rif,
- La mise en place d’une véritable autonomie pour la région du Rif.
Le gouvernement marocain a le devoir de trouver une issue favorable à la crise rifaine qui dure depuis trop longtemps. Pour cela il doit agir d’urgence en faisant cesser le racisme et les discriminations anti-amazighs, en rétablissant les Rifains et les Amazighs du Maroc dans tous leurs droits, tout en leur manifestant respect et considération.